Quels pouvoirs des maires sur la chasse ?

L’ASPAS est régulièrement interpellée sur les prérogatives des maires en matière de chasse. Depuis les dernières élections municipales, nous avons beaucoup creusé le sujet et mis à disposition de nos adhérents les outils pour interpeller les maires soucieux de la sécurité de leurs concitoyens et de l’épanouissement de la faune sauvage sur le territoire de leur commune. S’appuyant sur les initiatives courageuses de la maire de Valaire (contre le déterrage du blaireau) ou de Langouët (contre l’usage de pesticides), le service juridique de l’ASPAS s’est lancé dans la rédaction d’un guide pratique très complet à destination des élus.

LE GUIDE « MAIRES ET CHASSE » DE L’ASPAS

Un maire peut-il interdire la chasse le dimanche ? Empêcher le piégeage sur sa commune ? Refuser aux chasseurs l’accès aux terrains communaux ? Interdire le déterrage des blaireaux ? Protéger les renards ? Agir contre la chasse à courre ? Autant de questions qui trouvent leur réponse dans notre guide « Maires et chasse », disponible en libre téléchargement :

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Partie 1 – Les pouvoirs de police du maire

Réglementer la chasse près des voies publiques et/ou des habitations

Chaque année, on dénombre quantité d’accidents et d’incidents de chasse : vététistes ou ramasseurs de champignons confondus avec du « gibier », chiens de chasse qui s’attaquent à des animaux domestiques, balles perdues dans les voitures ou les maisons, etc. Des habitants sont même tués dans leur propre jardin ! Avec ces faits divers à répétition, de nombreuses personnes – qu’elles soient opposées ou non à la chasse – vivent dans l’inquiétude.

Si les compétences en matière de police spéciale de la chasse sont dévolues au ministère en charge de la chasse et au préfet (article L. 420-2 du code de l’environnement), le maire peut toutefois prendre des mesures sur le fondement des dispositions du code général des collectivités territoriales afin de prévenir d’éventuels accidents ou nuisances pour les habitants de sa commune.

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Partie 2 – Les pouvoirs de police du maire

Règlementer la chasse à courre à proximité des zones urbanisées

Interdite en Allemagne, en Belgique ou encore au Royaume-Uni, la chasse à courre est une pratique qui consiste à traquer, à l’aide d’une meute de chiens, un animal sauvage (cerf, chevreuil, renard, …) jusqu’à l’épuisement, avant de le « servir » à l’arme blanche (c’est-à-dire le tuer). En plus d’être particulièrement cruelle et barbare, cette chasse, par son principe même, rend impossible toute maîtrise de la course de l’animal chassé, et de la meute qui le poursuit. Chaque année on compte de nombreux accidents et incidents avec les riverains des abords des grands massifs forestiers où se pratique essentiellement cette activité : chiens qui divaguent sur les routes ou les voies ferrées, collisions routières, violations de domiciles, cerfs qui se réfugient dans les jardins, dans les salons parfois…

Le juge a plusieurs fois admis la limitation de la chasse à courre sur une zone à proximité des habitations pour des raisons de sécurité et d’atteinte à l’ordre public.

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Partie 3 – Les pouvoirs de police du maire

Réglementer la chasse à tir pendant une période de l’année sur une portion du territoire communal

Les caractéristiques du territoire communal et des activités agricoles ou de loisir peuvent rendre nécessaire l’interdiction de la chasse pendant une certaine période de l’année, sur une portion du territoire. Ainsi, un maire a pu interdire la chasse sur les vignes et les cultures fruitières pendant la période des vendanges.

On peut également imaginer une telle nécessité lors de l’organisation d’une rencontre sportive, de festivités en pleine nature, de sorties scolaires, exceptionnelles ou récurrentes chaque année. Comme il a été vu, l’interdiction ne doit pas être générale et absolue (toute l’année, et/ou sur l’ensemble du territoire communal), et doit être justifiée par des particularités locales et proportionnée à l’objectif de maintien de l’ordre public.

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Partie 4 – Les pouvoirs de police du maire

Réglementer la chasse à tir dans les zones de promenade très fréquentées

À notre connaissance, la jurisprudence n’a pas encore reconnu la légalité d’un arrêté municipal prohibant la chasse dans une zone de promenade très fréquentée. Mais un raisonnement a contrario permet d’envisager une telle mesure. En effet, la cour administrative d’appel de Bordeaux (arrêt du 17 mai 2005) a annulé un arrêté municipal qui interdisait tout acte de chasse dans une zone susceptible d’être fréquentée par des promeneurs en motivant sa décision par le fait que ladite zone était, d’une part, très peu urbanisée, et, d’autre part, qu’aucun incident du fait d’une action de chasse n’était démontré et qu’aucun aménagement spécifique n’avait été mis en place sur la zone.

A contrario donc, si des incidents répétés étaient constatés entre chasseurs et promeneurs, et/ou si des aménagements spécifiques (chemin de découverte, parcours de santé, …) étaient construits sur la zone, un tel arrêté pourrait être reconnu légal. Cet arrêté aura plus de chance de ne pas être sanctionné s’il n’est pas permanent ou si les mesures d’interdiction ne s’appliquent qu’à des périodes précises (vacances scolaires, jours fériés, etc.).

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Partie 5 – Les pouvoirs de police du maire

Règlementer la chasse certains jours de la semaine ou certaines heures

Au niveau national, aucune règle ne vient limiter les jours de chasse. Ainsi, des spécificités locales peuvent exister mais, théoriquement, la chasse, notamment à tir, peut avoir lieu tous les jours de la semaine, presque toute l’année.

Au regard de la jurisprudence, l’interdiction de la pratique de la chasse un jour de la semaine, le dimanche par exemple, ne peut pas être générale et absolue. Une telle mesure doit être justifiée par des circonstances locales particulières et être proportionnée à l’objectif de maintien de l’ordre public. Il est alors permis d’imaginer une interdiction de chasser certains dimanches de l’année, dans certaines zones où des incidents répétés mettent en péril l’ordre public (ordre public qui regroupe la sûreté, la sécurité et la salubrité mais aussi la tranquillité publique).

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Partie 6 – Les pouvoirs du conseil municipal

Interdire la chasse sur les biens communaux en l’absence d’ACCA

Sur les communes où aucune ACCA n’a été constituée, le droit de chasse appartient au propriétaire, c’est-à-dire à la commune sur les biens de son domaine privé. Si, en application de l’article 542 du code civil, les habitants de la commune peuvent bénéficier de l’usage des biens communaux et donc y chasser, la commune peut tout à fait décider de contrôler ou de ne pas exploiter la chasse sur ses terrains afin d’en faire des lieux de tranquillité pour la faune et les habitants de la commune.

La décision de mettre à disposition, ou non, des biens communaux aux chasseurs relève alors de la compétence du conseil municipal. En effet, c’est lui qui décide des mesures à prendre en termes de gestion de la chasse sur le territoire de la commune, le maire en assure l’exécution.

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Partie 7 – Les pouvoirs du conseil municipal

Interdire la chasse sur les biens communaux en présence d’une ACCA

Lorsqu’une ACCA est constituée sur une commune, tous les chasseurs de la commune ont par défaut le droit de chasser sur le territoire de l’ACCA, lequel est défini par l’ensemble des terrains situés sur la commune, à l’exception de ceux listés par l’article L. 422-10 du code de l’environnement. Le domaine public de la commune est d’office exclu du territoire de l’ACCA.  

À l’inverse, le domaine privé de la commune fait, par défaut, partie du territoire de chasse de l’ACCA. Tous les membres de l’ACCA ont alors le droit d’y chasser, la commune ne peut pas y interdire la chasse. Cependant, comme tout propriétaire, la commune peut décider de ne pas incorporer ses terrains dans ce territoire lors de la création de l’ACCA ou de les exclure du territoire d’une ACCA existante.

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pour aller plus loin

Laisser évoluer librement des espaces de notre territoire. Guide pratique destiné
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Partie 8 – Les pouvoirs du conseil municipal

Interdire la chasse sur les biens communaux dans le Bas-Rhin, le Haut-Rhin et la Moselle

Dans ces trois départements, pour des raisons historiques, c’est la commune qui gère le droit de chasse sur l’ensemble du territoire de chasse communal « au nom et pour le compte des propriétaires ». Le droit de chasser est alors loué par adjudication publique ou, dans certaines conditions, par convention de gré à gré ou par appel d’offres, pour une durée de 9 ans, selon un cahier des charges type, validé au niveau de la préfecture.

La commune agissant en tant que mandataire des propriétaires fonciers, elle ne peut décider d’interdire la chasse sur les terrains qu’elle gère. Selon le cahier des charges, elle peut cependant soumettre la chasse sur les lots qu’elle loue à des conditions de temps (interdiction de chasse certains jours ou certaines heures) ou de lieu (à proximité des habitations notamment).

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Partie 9 – Les pouvoirs du conseil municipal

Interdire le piégeage sur les biens communaux

Certaines espèces animales, en plus d’être chassées, peuvent faire l’objet d’actes de destruction en dehors de la période de chasse et avec des moyens prohibés à la chasse lorsqu’elles sont classées « espèces susceptibles d’occasionner des dégâts » (ESOD) en application de l’article R. 427-6 du code de l’environnement.

Sur les biens appartenant aux communes, celles-ci peuvent déléguer le droit de destruction à certains chasseurs ou piégeurs, à l’association locale de chasse ou à l’ACCA. Elles peuvent surtout décider de ne pas déléguer ce droit de destruction !

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Partie 10

Contrôle du maire sur les déclarations de piégeage

Préalablement à toute opération de piégeage prévue sur l’emprise de la commune, les piégeurs doivent effectuer une déclaration en mairie. Le maire est alors tenu de viser cette déclaration avant sa publication à l’emplacement réservé aux affichages officiels.

Cette déclaration est essentielle, elle permet en effet de s’assurer que le piégeur est bien titulaire d’un agrément de piégeage, et d’informer la population que des opérations de piégeage ont lieu sur le territoire de la commune. Au regard de la dangerosité de certains pièges, tant pour les animaux domestiques que pour les habitants, la rectitude de cette déclaration est primordiale.

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Partie 11

Influence du conseil municipal sur le classement des ESOD

Ni le maire, ni le conseil municipal ne disposent de pouvoir en matière de classement des Espèces Susceptibles d’Occasionner des Dégâts (ESOD). Celui-ci relève en effet du pouvoir du ministre chargé de l’écologie, et des préfets.

Pour autant, les communes sont au plus proche des motivations et conséquences de ce classement, qui sont « d’intérêt local ». À ce titre, le conseil municipal est légitime à formuler des « voeux » ou « motions » qui pourront être adressés aux décideurs pour tenter d’influer leurs décisions de classement ESOD.

Pour influencer les décisions des préfets et du ministère, la commune peut constituer un dossier en faveur d’une ou plusieurs espèces et l’adresser aux membres de la Commission départementale de la chasse et de la faune sauvage (CDCFS) afin que ces éléments locaux soient pris en compte par le préfet ou le ministre selon le groupe d’ESOD.

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Partie 12

Influence du maire en matière de battue administrative préfectorale

En plus d’être chassés et, pour certains, piégés, les animaux sauvages peuvent faire l’objet de battues administratives. Ces mesures permettent de tuer, sans quota, par tout moyen, en tout temps – donc hors période de chasse – et en tout lieu – par exemple sur les terrains interdits à la chasse – des animaux qui porteraient atteinte à des intérêts considérés comme majeurs.

Le préfet est seul juge compétent pour apprécier l’opportunité ou non de recourir à ces mesures spécifiques. Ni le maire, ni le conseil municipal n’a de pouvoir en la matière, il ne pourra pas s’opposer à l’organisation des opérations. En revanche, ces opérations dérogatoires au droit commun se déroulent sur des territoires communaux et peuvent mettre en péril l’ordre public, la sécurité et la tranquillité des habitants, et de leurs animaux domestiques notamment. Ce risque est d’autant plus important que ce type d’opérations est souvent ordonné dans l’urgence et qu’il n’existe aucune obligation d’informer spécifiquement les propriétaires ou locataires des terrains concernés par les opérations préalablement à celles-ci. C’est ainsi que de nombreuses personnes déplorent avoir constaté la présence de personnes armées et de chiens, parfois la nuit, sur leur terrain sans en avoir été averties, et alors que la chasse y est interdite.

Le maire est alors légitime à exiger la plus grande transparence quant à la nécessité de telles opérations, et de leur déroulé.

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Partie 13

Le rôle du maire en matière de battue administrative municipale

Les battues doivent répondre à une nécessité d’intérêt général, donc à une situation anormale causant un problème (surpopulation d’une espèce, dégâts importants sur des cultures, etc.) ne pouvant être résolu par les moyens de destruction de droit commun autorisés dans le cadre des réglementations relatives à la chasse et au classement des espèces susceptibles d’occasionner des dégâts (chasse, piégeage, etc.).

Or les chasseurs sont parfois prompts à demander leur organisation afin de pratiquer leur loisir en dehors de la période de chasse ou en des lieux qui leur sont interdits. Les habitants peuvent par ailleurs être effrayés par la présence d’animaux sauvages en raison de leurs méconnaissances des espèces.

Il appartient au maire de ne pas céder aux sollicitations infondées.

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Partie 14

Le rôle du maire en matière de déchets de gibier

Il peut arriver de tomber sur des cadavres d’animaux ou de restes d’animaux tués lors de parties de chasse, abandonnés dans la nature. Le maire, garant de la salubrité publique, est légitime à intervenir. En principe, tout abandon de déchets est interdit et le producteur de déchets est tenu d’en assurer l’élimination. Mais comme bien souvent en matière de chasse, des exceptions sont possibles, et le soin de s’auto-réglementer est laissé aux chasseurs…

En revanche, si la quantité de viscères et autres forment un véritable charnier, on peut raisonnablement affirmer qu’ils peuvent engendrer un risque pour la santé publique, et ne sont pas traités dans le respect de « bonnes pratiques cynégétiques ».

En sa qualité d’officier de police judiciaire sur l’étendue de sa commune, le maire a dès lors le pouvoir de verbaliser les délinquants s’ils sont identifiés, et, en sa qualité de garant de l’ordre public et donc de la salubrité publique, d’effectuer les démarches nécessaires pour l’évacuation des déchets (aux frais du contrevenant s’il est identifié) et d’assurer d’office l’exécution des travaux nécessaires aux frais du responsable.

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