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Victoire pour les bouquetins du Bargy !

Accusés de transmettre aux vaches une maladie bactérienne dans le massif du Bargy, 170 bouquetins sauvages étaient menacés d’abattage, et ce de manière indiscriminée. Grâce à la mobilisation citoyenne et une action en justice menée par un front associatif, le massacre de masse n’aura finalement pas lieu !   

Il paraît décidément bien loin, le nouveau monde tant espéré de l’après-pandémie Covid-19, où les humains apprendraient enfin à respecter le Vivant, reléguant leurs intérêts économiques au second plan. Malgré un avis négatif à l’unanimité des scientifiques, malgré 84% d’avis défavorables émis lors de la consultation citoyenne, malgré l’existence de scénarios moins destructeurs, le préfet de Haute-Savoie avait choisi la pire des solutions en se soumettant au lobby du reblochon : son arrêté, adopté le 17 mars, autorisait l’abattage d’individus sains !   

Pour la FNSEA et l’État, le coupable est toujours du côté de la nature. Pourtant, ce sont bien les troupeaux domestiques qui ont contaminé en premier les bouquetins sauvages. Et rien ne prouve que la rémanence de la brucellose soit due aux bouquetins qui, rappelons-le, ont déjà été éradiqués une première fois de France, de sorte que l’espèce, aujourd’hui présente en très faibles densités, est (théoriquement) protégée par la loi…  

Le scandale des abattages de bouquetins dans ce massif alpin dure depuis maintenant presque 10 ans. En 2016, l’ASPAS, One Voice et des accompagnateurs en montagne étaient parvenus à faire annuler l’arrêté de destruction de 2013. A l’époque, 233 bouquetins non testés avaient été abattus. Résultat ? Une augmentation de la prévalence de la maladie sur les bouquetins survivants, soit l’exact inverse de l’objectif recherché !   

Cette année, l’ASPAS, la LPO, AVES, One Voice, FNE et Animal Cross se sont unies pour porter l’affaire devant les tribunaux. Grâce à la jurisprudence déjà obtenue, l’optimisme était de mise, et de fait, l’ordonnance tombée le 17 mai est allée dans notre sens : les tirs indiscriminés sont suspendus ! Seuls les individus malades seront euthanasiés, une solution qui a prouvé son efficacité par le passé, et qui est acceptée par nos associations.       

Le juge a soutenu que « l’arrêté  attaqué  qui  permet  l’abattage  de  170 bouquetins,  sans  vérification  préalable  de  leur  statut  sérologique,  porte  une  atteinte  grave  et immédiate aux intérêts que les associations entendent défendre », et a notamment insisté sur l’absence de considération de solutions alternatives à la destruction :  

« Si  la  vaccination  des  bouquetins  s’est  avérée  inefficace pour  lutter  contre  la  maladie  de  la  brucellose,  les  différents  rapports  versés  au  dossier  insistent sur la nécessité de renforcer les mesures générales (éviter les points d’agrégation, gardiennage ou présence de chiens, vigilance particulière sur les zones de pâturage précoce au printemps), dont il ne  résulte  pas  des  pièces  versées  au  dossier  ni  des  échanges  à  l’audience  qu’elles  auraient  été mises  en  œuvre  au  titre  de  l’année  2022,  par  des  mesures  ciblées  sur  les  zones  de  succession rapprochée  des  bouquetins/cheptels  domestiques  telles  que  l’installation  de  clôtures  adaptées  et la mise en défens des zones-refuges de la faune sauvage. À ce titre, l’ANSES rappelle dans son avis du 30 novembre 2021 que « la maîtrise du risque via des mesures de biosécurité n’implique pas  un  bouleversement  des  pratiques  agricoles,  mais  des  actions  ciblées  dans  l’espace  et  le temps, en nombre modéré » et le Conseil National de la Protection de la Nature de préciser, dans son avis du 27 janvier 2022, que la mesure alternative visant à la conduite des troupeaux en vue d’une  plus-value  de  biosécurité  « n’a  jamais  été  soumise  comme  mesure  complémentaire  à évaluer  dans  les  saisines  ultérieures  et  n’est  pas  documentée  dans  les  bilans  sur  les  mesures sanitaires de maîtrise du foyer ». Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées  de  l’article  L.  411-2  4°  du  code  de  l’environnement,  du  fait  du  non-respect  de  la condition liée à l’absence de solution alternative satisfaisante est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse. »  

Télécharger l’ordonnance (PDF)

© Photo : Thomas Cugnod

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