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Chasse suspendue en Martinique pour 5 espèces menacées !
Saisi par l’ASPAS, la LPO et plusieurs associations locales*, le tribunal administratif de la Martinique suspend en urgence la chasse de plusieurs espèces d’oiseaux en mauvais état de conservation.
Moqueur corossol (notre photo), pigeon à cou rouge, pluvier argenté, pluvier bronzé et chevalier semi-palmé : à la suite de notre action en justice, le juge des référés a ordonné le 8 octobre 2024 la suspension de la chasse pour ces espèces compte tenu de leur état de conservation défavorable. En revanche, il n’a hélas pas suspendu la chasse pour d’autres oiseaux pourtant menacés en Martinique, comme le bécasseau à poitrine cendrée, la bécasseau à échasses ou le Grand chevalier à pattes jaunes.
Extrait de la décision :
« Compte tenu des éléments versés au dossier relatifs à l’état de conservation de ces espèces dans le département de la Martinique, des dégâts potentiellement conséquents que leur causerait la campagne de chasse en cours, même assortie de certaines restrictions définies en fonction des espèces, et sans qu’aucun motif d’intérêt général, tel par exemple que les nécessités de régulation des espèces, ne soient invoqués ou susceptibles de l’être, l’exécution de cet arrêté, d’application immédiate, porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate aux intérêts que les associations requérantes défendent, conformément à leurs statuts. Dans ces circonstances, la condition d’urgence requise par l’article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie.
Concernant le Pluvier bronzé et le Pluvier argenté, il ressort des pièces du dossier, notamment de la liste rouge des espèces menacées en Martinique, dressée en 2020 par le comité français de l’union internationale pour la conservation internationale de la nature (UICN), que ces espèces sont classées en espèces vulnérables, au titre des espèces menacées de disparition en Martinique, avec une tendance d’évolution des populations à la baisse s’agissant du Pluvier bronzé et inconnue s’agissant du Pluvier argenté selon la même liste, ou en déclin aux Antilles selon la revue des données internationales sur les limicoles de l’Office N° 2400596 5 française de la biodiversité (OFB). La situation de ces espèces est, en outre, qualifiée de fragile aux Antilles selon la même revue. Ni la fédération départementale des chasseurs de la Martinique, ni le préfet de la Martinique ne contredisent utilement ces données. Dans ces conditions, en l’état de l’instruction, malgré la fixation d’un quota annuel de prélèvement pour tous les chasseurs de 450 oiseaux pour le Pluvier bronzé et de 80 oiseaux pour le Pluvier argenté, le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation paraît de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’arrête du 16 juillet 2024.
Concernant le pigeon à cou rouge, le moqueur corossol et le Chevalier semi-palmé, il ressort des pièces du dossier, notamment de la liste rouge des espèces menacées en Martinique, dressée en 2020 par le comité français de l’UICN, que ces espèces sont classées en espèces quasi-menacées, qui correspond aux espèces proches du seuil des espèces menacées ou qui pourraient être menacées en Martinique si des mesures de conservation spécifiques n’étaient pas prises, avec une tendance d’évolution des populations inconnue, ou en déclin aux Antilles et une situation de conservation qualifiée de fragile pour le Chevalier semi-palmé selon la revue des données internationales sur les limicoles de l’OFB. Ni le préfet de la Martinique ni la fédération départementale des chasseurs de la Martinique, ne contredisent utilement ces données. Dans ces conditions, en l’état de l’instruction, malgré la fixation d’un quota annuel de prélèvement pour tous les chasseurs de 20 000 oiseaux pour le Pigeon à cou rouge et de 400 pour le Moqueur corossol et un quota journalier maximum par chasseur de 10 pour le Chevalier semi-palmé, le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation paraît de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’arrête du 16 juillet 2024. »
Ce n’est pas la première fois que la justice, saisie par nos associations, vient au secours des oiseaux menacés en Martinique. En septembre 2022, un jugement similaire avait permis de suspendre un arrêté similaire en épargnant des fusils pas moins de 12 espèces jusqu’à la fin de la saison de chasse. Un arrêté que le tribunal administratif de la Martinique a ensuite définitivement annulé, en avril 2023.
* L’association des mateurs amicaux des z’oiseaux et de la nature aux Antilles (AMAZONA), l’association pour l’étude et la protection de la vie sauvage dans les petites Antilles (AEVA) et l’association pour la sauvegarde et la réhabilitation de la faune des Antilles (ASFA)
Photo d’en-tête : Moqueur corossol © Adrien Chateignier / CCO